Le Puy-en-Velay n’est pas aisément accessible de Toulouse. Un avion jusqu’à Lyon, puis un train vers St Etienne et enfin le Puy.
Voyage long mais on n’est pas déçus. Après une journée passée à Lyon, nous arrivons au Puy. Jolie petite ville avec « Notre Dame de France », une Vierge de 22 mètres, toute en métal de canons fondus perchée sur un piton rocheux.
En face, une petite chapelle plantée sur l’autre cheminée volcanique de la ville : Saint-Michel d’Aiguilhe : mignonne, fraîche et calme avec cette odeur de bougie fondue si caractéristique.
En fin d’après-midi, nous allons à « l’accueil pèlerins » nous y sommes reçus chaleureusement avec un verre de verveine (au Puy en Velay, on boit de la verveine en alcool, en pisse-mémé ou en boisson rafraichissante… et on mange des lentilles).
Nous discutons avec d’autres pèlerins (ici, on n’est pas randonneur mais « pèlerin » ou « Jacquet »). Nous sympathisons avec trois Canadiennes et une Allemande qui est partie de Cologne et ira jusqu’à Compostelle : 4000 km !
Je retrouve des phrases toutes faites, des expressions que j’ai lues dans le guide ou sur Facebook, sur « Le Chemin », le Camino, on se souhaite « Buen camino », « Ultreïa » (une expression d’encouragement et de soutien entre marcheurs). J’entends parler de « l’appel du Chemin », de « l’esprit du chemin » ou encore de « l’esprit pèlerin »… J’écoute, je ne sais pas ce que cela signifie… le savent-ils eux-mêmes ?
Une des Canadiennes nous demande combien pèse notre sac, « je ne sais pas… 8 ou 9 kilos environ et le tien » ? Elle se redresse souriante « 7,2 Kg ». Une autre me dit fièrement « 6,4 Kg », la troisième « 6,8 Kg » … c’est l’une des grandes préoccupations (légitime) de beaucoup de pèlerins, presque une obsession. C’est là qu’interviennent les théories fumeuses « ton sac ne doit pas dépasser 10% du poids de ton corps » (ce qui est absurde) et le très commun « ce sont tes peurs que tu transportes avec toi dans ton sac » … Moi qui pars souvent en bivouac de plusieurs jours, parfois en haute montagne, je ne laisse rien au hasard, alors oui, certaines choses peuvent ne pas me servir mais en cas de problème, je ne suis jamais démuni : alors peur ou pas peur ?
Réserver à l’avance implique que, peu importe la difficulté ou la fatigue, nous devons arriver au point prévu. Or, rien n’est pire que de se forcer pour se dégoûter de quelque chose. Je me suis donc dit qu’on ferait le Chemin au jour le jour ; je me fais confiance, je me débrouille toujours. Toutefois, les Canadiennes nous mettent en garde! La Covid qui a privé de marche de nombreuses personnes, le pont de l’Ascension et le fait que ce soit une année Jacquaire, c’est-à-dire que la Saint Jacques tombe un dimanche (ce qui se produit quatre fois tous les vingt-huit ans) : tout cela risque de nous poser des problèmes d’hébergement.
Elles nous disent aussi que c’est formidable d’assister à la messe avant le départ et de recevoir « la bénédiction des pèlerins » par le curé.
Bon… moi, cela m’importe peu et surtout, je n’ai pas envie de démarrer avec 200 autres personnes en même temps mais je vois que cela plairait à Isabelle, non pas la messe en elle-même, mais ce fameux esprit communautaire et cette entraide sont les valeurs qui lui plaisaient dans ce chemin. Je ne veux pas qu’elle ait des regrets à cause de mes idées que je sais parfois un peu obtuses sur le sujet.
Nous achetons une « crédenciale », sorte de passeport que tu fais tamponner à chaque étape et qui prouve que tu as bien fait le pèlerinage.
Tout le monde a une coquille de Saint Jacques accrochée à son sac à dos (sauf moi car je suis un rebelle). Isa en choisit une jolie peinte en rose fuchsia qui, je dois dire, va bien avec le bleu de son sac… le chic parisien, que voulez-vous !
Au Moyen-Âge, on ramenait sa coquille d’Espagne pour preuve d’avoir accompli le pèlerinage, car à l’époque on n’en trouvait nulle part ailleurs.
C’est de là que la « Pecten maximus » a tiré son nom commun de « coquille saint Jacques ».
Le lendemain matin à 7h, nous nous rendons à la cathédrale. Il y a sûrement 200 personnes et une montagne de sacs à dos contre les murs.
C’est la seconde fois que j’assiste à une messe, la dernière c’était à Calcutta avec mère Teresa. Tout cela est bien trop sérieux pour moi, en revanche, je prie pour que personne ne me téléphone ; la sonnerie de mon portable (Les Bronzés font du ski) ne serait pas du meilleur effet dans cette solennité (ça me ferait rire, mais que moi, je pense). Comme prévu, à un moment je m’éclipse pour aller chercher du pain… 200 personnes à la boulangerie en même temps, je ne le sens pas trop.
En fait, je ne sais pas comment, mais même si tout le monde est sorti en même temps, les gens se sont dispersés et on est partis tranquilles.
C’est parti !