Récit de voyage en Thaïlande
Extrait du livre “Et si c’était mieux là-bas?”
« Des millions de lumières illuminent Bangkok. Dans le restaurant, à quelques tables de la nôtre, Hanna avise une fille seule « ce n’est pas cool de passer Noël toute seule, ça te dit de l’inviter ? ». Puis, elle se lève et invite Yaël, une Israélienne. Nous trinquons ensemble. Arrive Allan, un copain anglais rencontré il y a quelques mois dans les montagnes au nord de l’Inde. C’est un bon vivant et un terrible fêtard. Après force tapes dans le dos et éclats de rire, nous finissons le repas tous ensemble. Il nous invite ensuite à boire une bouteille de Chablis qu’il gardait « pour une grande occasion ».
Allan a les muscles de Stallone, la tête de Woody Allen et les tatouages d’un Yakuza. Son maintien droit et distingué, son humour et son élocution de présentateur de la BBC en font à mes yeux la plus pure et la plus flegmatique caricature du Vieil Empire. Nous nous asseyons sur la grande étendue herbeuse du Palais royal. Après avoir émis une critique cinglante sur l’entretien du gazon, Allan roule quelques pétards puis débouche le Chablis et en boit une gorgée. Il ferme les yeux, lève le menton et fait claquer sa langue en connaisseur « Jesus fucking Christ, mes amis, there is an angel pissing in my mouth ». Tout est dit.
Comme nous sommes quatre falang (étrangers) à boire et à rire, nous sommes rapidement entourés de curieux et de vendeurs en tout genre. Allan achète à l’un d’eux un ballon gonflé à l’hélium ; il en défait le nœud et en aspire une bouffée. Quand il ouvre la bouche pour entamer les premières mesures de « God save the queen » il a une irrésistible voix de canard. Tout le monde explose de rire. Nous nous passons le ballon ; le vin et l’herbe aidant, nous pleurons de rire. Les Thaïs ne comprennent pas, je passe le ballon à l’un d’entre eux ; quand il ouvre la bouche, tous ses copains éclatent de rire et se précipitent dessus pour essayer à leur tour.
Le lendemain matin, je parcours les nombreux petits mots et annonces sur le panneau de notre guest house ; j’en trouve parfois pour moi, j’en laisse aussi pour des copains qui passeront ici. Parmi les mots personnels, les avis de recherche, les trucs à vendre, j’en vois un disant qu’à la frontière birmane, un camp de réfugiés karens (tribu des montagnes) a désespérément besoin de professeurs d’anglais. Il est aussi mentionné que ça peut-être dangereux car il arrive que l’armée birmane rôde aux alentours et rackette les Occidentaux. Il arrive également que des tirs aient lieu. Je ne sais pourquoi mais ces dernières précisions achèvent de me convaincre… l’idée que je me faisais de l’aventure, sans doute.
Il faut trois semaines pour obtenir un visa pour le Vietnam ; la procédure est lancée mais en attendant le visa, j’ai envie de tenter l’expérience. Je propose à Hanna d’y aller.
– Quand ?
– Ben… maintenant, on finit notre petit-déjeuner, on fait nos sacs et on y va. »
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