De nombreux sites naturels à travers le monde se retrouvent aujourd’hui menacés par la fréquentation massive engendrée par ce tourisme 2.0 dont Instagram est l’un des piliers. Il va jusqu’à mettre en péril la nature et son écosystème, des villages, des gens…
En Thaïlande, l’île de Kho Phi Phi Ley où fut tourné le film « La plage » dut fermer plus de deux ans. En effet, ses eaux jadis cristallines durent faire face à l’afflux massif de plus de 5 000 visiteurs par jour !
Parmi eux, de nombreux Chinois ne restant que quelques dizaines de minutes, le temps de prendre quelques selfies avant de repartir sur les puissants hors-bords affrétés par des agences spécialisées !
Sur Instagram, les photos de vacances de rêve explosent ! En effet, il est toujours de bon ton de montrer sa merveilleuse vie (sa vie rêvée ?) sur internet. On cherche à avoir LA photo, celle qui nous fera briller auprès de nos abonnés.
Cette course au cliché engendre une folie de “surtourisme”. Des sites entiers se retrouvent assaillis de visiteurs faisant la queue pour LE selfie qui montrera à sa communauté qu’on était là !
Une petite île au large de Bali dont je tairai le nom (je l’ai connue si belle et tranquille), en est un autre témoin. Il y a une dizaine d’années, peu de touristes s’y aventuraient. Mais ça, c’était avant que des influenceurs aient découvert les beautés de ses plages tranquilles. A cause de cette publicité éclair, l’île est passée du coin calme et sauvage à un parc d’attractions pour touristes. On y fait la queue pas moins d’une heure pour prendre sa photo.
Deux policiers aux abords du spot font la circulation, laissant passer les gens au compte-goutte (contre une contribution aux bonnes œuvres de la police). Trois minutes par personne ! Sur Instagram, l’hashtag du nom de la plage s’élève à plus de 211 000 posts… presque autant que celui du mont Saint-Michel.
En France nous avons également de magnifiques sites qui, s’ils n’ont rien d’exotique à nos yeux d’Occidentaux, le sont assurément aux yeux d’un touriste étranger !
Ce surtourisme éclair et géolocalisé pose de vrais problèmes. En effet, cette présence trop importante de gens dégrade la nature. Les réseaux sociaux exacerbent les tensions en générant d’un coup une fréquentation massive sur un espace restreint.
Instagram braque la lumière sur des lieux jusqu’alors confidentiels qui se retrouvent face à un afflux massif de visiteurs alors qu’ils n’ont pas la capacité d’accueillir tout ce monde.
Ce site est-il suffisamment photogénique ? Fera-t-il rêver ma communauté ? Me rapportera-t-il des like ? Si oui : pose, air boudeur, bouche de canard, clic clac l’affaire est dans le sac !
L’« instagrammabilité » des lieux touristiques est devenue une vraie menace. Un embouteillage digne du périphérique parisien sous le pont d’Arc, en plein cœur des gorges de l’Ardèche ? Si, c’est possible !
Suite à quelques posts d’influenceurs (qui portent bien leur nom), la grande arche de pierre a vu défiler des touristes à pied, en canoë et en kayak.
Une fréquentation extrême, difficilement croyable sur la petite rivière encaissée ardéchoise.
Des Calanques de Cassis aux champs de lavande de Provence, en passant par les gorges du Verdon, plusieurs sites ont dû être fermés au public, au moins momentanément.
La France est la première destination touristique mondiale avec 90 millions de visiteurs internationaux en 2019. Elle souffre donc de plus en plus de ce « surtourisme ».
Parmi les victimes de ce fléau 2.0, les paysages « instagrammables » se retrouvent en première ligne. Sur les réseaux sociaux, les internautes cherchent à publier l’image qui leur remportera des « like ».
Or dans la vraie vie, le rocher ou l’arbre au tronc courbe et bucolique, la jolie vue sur un champ de tournesols attirent une vraie foule en quête du même cadrage, du même point de vue.
Un mimétisme grotesque qui questionne, car dans ces paysages, c’est toujours le même exact endroit sous le même angle que la photo est prise alors qu’à quelques centaines de mètres, la campagne est déserte !